[ Trophée Lexien ] La suite

Quand mes paroles se perdent au fond de ma gorge, se nouant en un nœud inextricable.
Puis quand même mes pensées s’égarent aussitôt que je les ai ressenties, perçue, ne pouvant plus me souvenir de ce qui effleure ma conscience.

Mon corps sera-t-il encore présent ou finira-t-il par s’effondre lui aussi? Ce corps que j’ai tant maltraité, sera-t-il stable?
Cette peau que j’ai voulu déchiqueter,
Ce crâne que j’ai voulu fracasser contre un beau papier-peint couleur turquoise pâle,
Cet estomac secoué de spasmes,
Victime innocente de mes déboires solitaires et d’un trop plein d’attentes .

Je subis mon corps par mes propres fautes.
Il me semble lourd mais pourtant si vide à la fois,

Vide de chaleur ,
Avide de caresses aigres-douces,
De bras solides pour rattraper sa chute.

S’il s’effondre, que restera-t-il?
Si je m’effondre, tout en cet univers se brisera.

Mon corps , pilier contre vents et marées, ne peut pas tomber. Déchoir m’est impossible, il faut que je restes debout. Tenir bon.

Aucune entité ne me soulèvera, aucune n’a la force de le protéger de ce qui le détruit.

Qui?

Qui mettra mon corps à l’abris de moi-même?

A corps et à cris.



L'extase insouciante, frémissante, sous son léger voile de lin, est comme une aube paresseuse qui flotte sur quelques collines dénudées. Un tremblement agite l'espace d'un instant les voluptueuses courbes de la divine créature qui se tient là, quasiment inerte.
Une bouche légèrement entrouverte, d'où semble s'échapper un gémissement de douleur, se crispe alors lentement avec une force incroyable. Les pores suintent et laissent s'échapper, par flots continus, les vapeurs méphitiques d'une nauséabonde sueur.

Elle hurle. Elle a mal.

Mais elle se détend à nouveau. La face plus calme mais toujours légèrement congestionnée par l'effort. Son souffle se veut plus régulier. Mais cela ne dure pas. Elle recommence à forcer, et la douleur revient. Elle essaye de respirer profondément, calmement, mais elle a toujours aussi mal. Elle pense qu'elle ne va pas tenir. Elle entend cette voix profonde et rassurante ; elle l'entend mais ne la comprend qu'à peine. Elle veut que cela se termine au plus vite.
Cela fait plusieurs heures qu'elle souffre, allongée sur une sorte de lit grotesque. Elle a tellement mal qu'elle ne peut quasiment pas bouger. Elle a même du mal à respirer. Les douleurs ne se calment pas et augmentent en intensité tandis que le temps passe. Bientôt, il lui semble que son corps est en feu, que tous ses os sont brisés. Elle n'en peut vraiment plus. Mais elle doit tenir.

Les muscles et la peau sont tendus, crispés. Sa face blême n'exprime que douleur. Ses membres tremblent de terreur. Elle sent la totalité de son corps, comme jamais auparavant, et elle a mal. Elle a mal partout. Tout n'est que douleur.

Et soudainement, tout s'achève. Ne reste qu'un profond soulagement, des cris de joie, des félicitations adressées de part et d'autre et enfin, elle entend un hurlement. Le hurlement de poumons se remplissant subitement d'air.

Son enfant est né.